En cinquante années d’existence, la chasse de têtes est devenue une science, déployant une discipline rigoureuse
– la recherche de dirigeants par approche directe
– pour présenter un choix de solutions (trois au minimum) en réponses possibles à un besoin identifié : un nouveau dirigeant-clé (H/F) pour une organisation. La méthodologie est implacable : définition d’un profil cible, recherche de 100+ contacts pertinents pour dix rendez-vous, trois finalistes présentés, jusqu’au dirigeant recruté. C’est une loi statistique, presque mathématique. Pour autant, chaque mission est un projet unique.
1. Le digital au service de la chasse de têtes
Aussi méthodique qu’elle soit, conservatrice et classique qu’elle puisse paraître aux yeux de certains, la chasse de têtes se transforme à grande vitesse et intègre toutes les nouvelles technologies. En voici des illustrations :
– Gestion des données. Ce que font des sites de rencontre de personnes, des machines à CV sauront le faire aussi : trier des millions de profils en quelques millisecondes…L’utilisation du cloud, à distance, et la sécurité des données, confidentielles, sont deux instruments du futur de la chasse.
– L’appui des réseaux sociaux. Le digital transforme la recherche de talents : fin des petites annonces, recherches par mots clés, sollicitations de communautés, outils de sélection en ligne… Pour le coeur de son métier, la mise en relation, la chasse de têtes s’appuie sur toutes les applications de mise en contact rapide et fait ses choix selon les secteurs, les pays, les populations visées…
– Son territoire, c’est le monde. Aucune chasse de dirigeants ne se limite à une région ou à un pays. Le talent cherché vit peut-être loin ou s’est idéalement frotté à d’autres cultures. Les premiers entretiens se feront à distance, réservant le face à face à l’ultime étape de sélection.
– Évaluations complexes et garanties renforcées. Avec des gouvernances impliquées, la prise de décision devient collégiale et plus complexe. Dès lors, les évaluations et «assessments», pour un meilleur «fit culturel» entre l’entreprise et les candidats d’une part, et des garantiesdurables d’autre part, deviennent des dimensions complémentaires de la chasse, incontournables pour la réussite de cette «industrie».
Les 7 révolutions du marché de la chasse du futur
La chasse de têtes sera professionnelle, plurielle et internationale ou ne sera pas.
Les cabinets intégreront chaque année de nouvelles technologies dans leurs outils CRM et méthodologiques, alliant distance, données et sécurité.
Les consultants ne feront pas que chasser des dirigeants, ils conseilleront des leaders (à long terme, tout au long de leur carrière).
Le marché cherchera de nouveaux types de leaders,
« collégiaux », pour motiver les collaborateurs dans un monde où l’on pense (trop) à « se servir » plutôt qu’à « servir les autres ».
Le leadership sera ouvert, attentif et capable de donner du sens (care), audacieux, divers et agile (dare), multiculturel et capable d’embrasser toute la planète à long terme (share).
Le leadership intégrera de plus en plus de dimensions sociétales (gouvernance, stakeholders, environnement, géographie, long terme, culture de l’entreprise, engagement des employés, pression au travail, innovation, collectif, digital, etc.).
En entretien, on se préparera à des éclairages multiples et on parlera plus de perspectives d’avenir que du passé.
(Source : Les Associés @ALSPECTIVE)
(source : ALSPECTIVE Leadership Index)
2. L’art du « conseil en leadership » Le recrutement d’un dirigeant ne pourra jamais se résumer à des chiffres, des mots (même clés) ou des tris de CV.
– La chasse de têtes inclut l’art d’appréhender aussi du non-quantifiable.
Loin du passé, c’est aux «frontières du futur» que se situe l’art du consultant conseiller de chasse : définir le sens du besoin stratégique à long terme qui se cache derrière une fiche de poste à pourvoir et qui impactera la vie du futur recruté ; pousser le client « à la limite », en dehors de sa zone de confort dans laquelle il se rassure en cherchant une reproduction du passé (alors que le successeur ne sera jamais comme le partant) ; avoir l’audace d’aller chercher des profi ls à potentiel (et non ayant réussi à une autre époque) ; savoir convaincre les meilleurs talents de rejoindre une entreprise à laquelle ils n’avaient pas pensé. La chasse de têtes devient l’art d’inventer, avec des profils en devenir, des futurs possibles pour l’entreprise.
– Elle intègre des dimensions de plus en plus complexes du leadership.
Il est des compétences qu’on n’apprend pas dans les écoles (même grandes), qui échappent à l’accumulation des connaissances et de l’expérience et qu’un consultant devra évaluer :
les émotions, l’audace,la gestion de l’échec, comment réussir sa vie, la décision à plusieurs, etc.
Autant d’atouts précieux pour le leadership, soulignés par l’engouement récent pour le quotient émotionnel (QE) en sus du quotient intellectuel (QI). On peut aussi éclairer les candidats sur trois dimensions essentielles du leadership : care, dare, share (sens, agilité, partage). Elles ne sont nulle part inscrites dans un CV et sont utiles à tous les postes, pour tous les responsables et tous les clients (voir schéma ci-dessus).– Elle se développe encore, à un niveau record.
À l’échelle mondiale, selon l’AESC, le syndicat professionnel de référence des chasseurs de têtes, l’année 2016 enregistre une hausse de 4,4 % par rapport à l’année record 2015 avec 12,9 milliards de dollars de recette.– … et se transforme, grâce à deux tendances lourdes pour le secteur qui contribuent à sa croissance :
• l’expansion sur les nouveaux marchés :
Est européen, Asie, Afrique ;
• la diversification vers du conseil au leadership, en complément de l’activité de chasse, pour tous les cabinets : le plus grand acteur mondial, coté en bourse après cinq acquisitions, déclare 50 % de son CA en dehors de la chasse.
Nos conseils aux candidats-dirigeants du futur
Un chasseur de têtes voit en vous un leader. Tâchez de ne pas le décevoir.
Les bons chasseurs connaissent leurs marchés et pensent toujours à long terme. S’ils vous reçoivent, c’est pour offrir des conseils gracieux et vous mémoriser.
Tout dirigeant, candidat ou pas, a tout intérêt à se confier à un bon chasseur. Ce dernier est tenu à la confidentialité.
Recevoir un appel, c’est avoir la chance de pouvoir préciser son projet en quelques minutes pour être un jour sollicité à (très) bon escient.
Dans l’entretien des réseaux, un chasseur occupe une place incontournable. Il est proche de ses clients, donc potentiellement d’un marché ciblé.
Un chasseur peut connaître bon nombre de contacts utiles mais s’interdira de vous les donner s’il n’a pas un mandat justifiant la fourniture d’information.
Être fier de ses échecs, sources d’enseignements. Les temps ont changé : le fait de ne pas être retenu, d’avoir changé d’entreprise, d’approcher de la fatidique barrière des 60 ans (on disait 50 ans il y a cinq ans et 40 il y a dix ans), de créer une entreprise ou d’essayer d’en reprendre une, de partir à l’étranger, de glisser dans un autre secteur privé ou public… reflète votre audace. L’échec sera autant valorisé aujourd’hui qu’un parcours linéaire et sans faille. Il sera instructif.
Devenir cible des chasseurs : soyez visible, au croisement de réseaux connectés avec des communautés, cotisants à l’association des anciens, exemplaires dans les services rendus, mémorisés par vos patrons, forts de vos expériences avec les autres cultures.
Votre CV fera une page (éventuellement avec des annexes) : en français dans Wats4U, en anglais dans BlueSteps.
Restez vous-même et positif en toutes circonstances.
– toute entreprise, même start-up, pourra recourir à un chasseur dans son propre intérêt : « si vous trouvez que passer par un professionnel coûte cher… Essayez un amateur ! »
– tout candidat dirigeant continuera de solliciter le conseil d’un expert du recrutement sur un pays cible, une fonction cible, son secteur cible voire une entreprise cible ;
– tout (bon) chasseur de têtes restera mieux placé, dans sa science et son savoir-faire en matière de recherche de dirigeants, qu’une entreprise, pour laquelle recruter un dirigeant sera toujours un acte d’exception.
Autant qu’une science ouverte aux nouvelles technologies, la chasse de têtes reste un art qui touche à l’humain. Son avenir est d’autant plus assuré que la société réservera aux femmes et aux hommes la place qui leur revient face aux robots : celle de diriger.
(mandat exclusif de recherche) et « contingency »
(fourniture de CV payée aux résultats).
Que penser de la concurrence des cellules de chasse internes ?
Il y aura toujours des chasseurs, même si les grandes entreprises mettent en place des cellules de chasse interne pour approcher des cibles externes. C’est une approche intéressante pour des cadres supérieurs, préférable à celle de confier tous les recrutements à des logiciels ou des robots. En revanche, imaginer que l’on aura la même capacité d’attractivité et de confiance dégagée auprès des candidats et notamment des plus hauts dirigeants est un leurre. La cellule de chasse d’une grande entreprise peut prolonger le travail de la machine, mais ne peut pas se substituer au chasseur indépendant. Elle est toujours partie prenante et se positionne comme vendeuse d’une offre d’intégration. Le chasseur n’est jamais dans cette posture.
Il est à la fois ambassadeur de son client mais aussi conseiller bienveillant du candidat, avec lequel il souhaite établir une relation de grande qualité et pour des décennies.